Que deviennent nos eaux usées ?

Contrairement à ce que pense la moitié de la population française, l’eau potable ne vient pas des stations d’épuration mais des usines de potabilisation !

Les stations d’épuration, elles, servent à nettoyer les eaux usées de nos habitations et agglomérations, à éliminer les substances indésirables avant de les rejeter dans le milieu naturel. En fonction de la taille des villes et du nombre d’habitants, plusieurs techniques existent, de la plus répandue en station d’épuration, ou « STEP » pour les intimes, à la phyto-épuration. Pour autant, est-ce que toutes ces techniques se valent ? Sont-elles efficaces à 100% ? On vous explique, step by step !

Une station d’épuration, c’est quoi ?

Comme son nom l’indique, la station d’épuration (STEP) sert à « purifier » l’eau avant de la rendre au milieu naturel. Dans les grandes et moyennes villes, on trouve souvent des stations d’épuration dites « à boues activées » ou parfois, des stations à « biofiltration », comme les deux grandes STEP de Bordeaux Métropole.
Leur fonctionnement se décompose en plusieurs étapes : un traitement primaire mécanique pour enlever les déchets grossiers, un traitement secondaire biologique et/ou physico-chimique pour enlever les matières minérales et organiques en solution dans l’eau, telles que les matières azotées, phosphorées et carbonées, puis un traitement tertiaire encore optionnel et utilisant diverses techniques de plus en plus innovantes. Enfin, la dernière phase est le traitement des boues issues des étapes successives, qui seront soit réutilisées pour l’épandage agricole, soit, incinérées et valorisées énergétiquement.

> Lire notre article Comment fonctionnent les stations d’épuration ? 

Les boues se retrouvent donc en fin de course sur les sols ou dans l’air, où les impuretés enlevées à nos eaux usées finiront leur dispersion… Parallèlement, on trouve d’autres techniques d’épuration qui se développent progressivement, avec des procédés qui mettent en avant les plantes et la biodiversité.

 

Pour les petites villes : les zones à lagunages

Le lagunage est une technique biologique rustique d’épuration des eaux usées, où le traitement secondaire est assuré par la végétation aquatique et les microorganismes, essentiellement des algues et des bactéries. Ce dispositif consiste à faire séjourner pendant une longue durée les rejets dans des bassins successifs de grande étendue (ressemblant à des étangs) et de faible profondeur (environ 1m). Cela permet de favoriser le développement des micro-algues qui apportent l’oxygène nécessaire aux bactéries assurant l’épuration.

Une chaine alimentaire se met alors en place : phytoplancton, zooplancton, daphnie… Mais une partie des polluants ne sera pas traitée avec ce dispositif. Aujourd’hui il existe des stations d’épuration plus performantes que les simples lagunes, comme les disques biologiques, les filtres plantés de roseaux….

Les filtres plantés de roseaux font transiter l’eau dans des bassins moins profonds, au cortège floristique semblable aux bords des lacs naturels, des cours d’eau, des annexes hydrauliques, des barrages, ou encore des retenues et des plans d’eau : iris, roseaux, joncs… Ces derniers absorbent les éléments minéraux issus de la dégradation de la matière organique pour leur croissance.

Les racines des roseaux créent un environnement favorable au développement de la flore bactérienne du sol en oxygénant ce dernier. Il permet une bonne infiltration des effluents et assure un côté esthétique certain !

Ces zones permettent l’épuration de l’eau et son retour dans le milieu naturel tout en constituant un réservoir important de biodiversité et une zone humide.

 

Un enjeu de taille : réduire les micropolluants résiduaires

Si les stations d’épuration classiques sont efficaces pour lutter contre l’azote, le carbone et le phosphore, elles laissent malheureusement passer une grande quantité de substances indésirables entrant dans la composition des produits d’usage domestique, médical ou industriel : plastifiants, détergents, métaux, hydrocarbures, pesticides, cosmétiques ou encore, médicaments.

Près de 147 tonnes de résidus de médicaments, de pesticides et métaux seraient renvoyées chaque année dans l’environnement une fois les eaux usées traitées, selon une étude récente menée par l’INRAE !

Même à faibles concentrations dans l’eau, ces micropolluants sont susceptibles d’engendrer des effets négatifs sur l’environnement et les organismes du fait de leur toxicité, de leur persistance ou de leur accumulation. Parmi les classes médicamenteuses concernées on retrouve le plus régulièrement les anti-inflammatoires, les hormones stéroïdes, les antibiotiques et les anti-cholestérols. Mais les connaissances actuelles sur leurs effets écotoxicologiques sont encore insuffisantes…

La question de leur réduction est devenue un enjeu majeur et les acteurs de l’eau en France explorent la question. L’innovation et les nouvelles technologies sont prometteuses, comme les bioréacteurs à membranes, l’ozonation et l’adsorption par charbon actif. La Suisse fait figure de proue en la matière et va équiper 120 stations d’ici 2035 pour éliminer 80% des micropolluants. Un surcoût que la population suisse a accepté de payer au regard des bénéfices attendus pour l’environnement, via une taxe provisoire et via la facture d’eau !

 

Les zones libellules, inspirées des zones humides naturelles

Pour éliminer les micropolluants, il existe aussi des zones expérimentales naturelles, dites « zones libellules » (LIberté Biologique Et de LUtte contre les polLuants Emergents), encore appelées moins poétiquement « Zones Humides ARTificielles » (ZHART).

C’est une solution complémentaire en sortie de stations d’épuration, basée sur la capacité épuratoire de la nature. Un ensemble de bassins d’eau, regroupant successivement différentes espèces de plantes et de micro-organismes associés, choisis pour leurs capacités naturelles à absorber certains polluants. La zone est conçue pour abriter différents types de milieux humides (bassin à phytoplancton, roselière, méandre, delta, prairie humide…) qui permettent de varier les vitesses d’écoulement ou encore les profondeurs d’eau afin d’améliorer le traitement. De nombreux résidus pharmaceutiques étant photosensibles, c’est-à-dire qu’ils se décomposent lorsqu’ils sont exposés à la lumière pendant une durée suffisante, ces zones offrent de larges avantages à explorer.

Des projets de « zone libellule » sont en cours comme celui de Mios en Gironde, pour une expérimentation grandeur nature et éviter ainsi le rejet des micropolluants dans la Leyre.

 

Si l’importance de l’élimination des micropolluants n’est plus à démontrer, il est évident que sa mise en œuvre va représenter un coût important pour l’usager de l’eau, c’est-à-dire… nous ! À moins d’instaurer une taxe pour les industriels qui utiliseraient ces substances dans leurs produits ? En attendant, et quelle que soit la technique d’épuration mise en œuvre dans votre commune, on gagnera tous à les réduire à la source dès maintenant. Et ça commence dans nos maisons, via la réduction de l’usage de certains produits et le changement de pratiques.

 

Sources et liens utiles

Téléchargez le guide « Agir contre les micropolluants »

Passez à l’action en fabriquant vos produits !

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